V2V TRIP

Du vignoble du Jurançon aux vignobles de la Californie, traversée d'un océan en cargo et d'un continent en vélo. From Jurançon vineyard to Napa Valley vineyard, through the Atlantic ocean by cargo ship and from New York to San Francisco by bicycle.

From Mount Vernon (Ohio)

May 20th

Ces demi-étapes ont ceci de bon qu'elles reposent, permettent d'apprécier la route et de prolonger les contacts.

Un léger mieux

Je vous ai donc laissés dans l'État de WEST VIRGINIA après avoir franchi un impressionnant pont métallique à CHESTER. Cette fois, je suis vraiment sur une petite route, à l'est de l'OHIO RIVER, au milieu de la verdure, alors que sur l'autre rive j'aperçois la grand route et les alignements d'usines qui font suite à ceux que j'ai longés le matin. Si le ciel est toujours encombré, le soleil s'affirme davantage. J'avais quitté Crystal et le family dinner en maillot malgré le temps très gris et le froid et voici que la tenue légère se révèle de plus en plus adaptée au fil des miles. Il faut vous expliquer que j'en ai un peu assez de changer de tenue en fonction du temps et j'ai décidé que pour la journée c'est ou le poncho ou le maillot. Les tenues intermédiaires sont dans les sacoches. Tout va bien donc jusqu'au moment où un nuage qui me visait depuis un moment se déverse sur mon chemin: poncho. L'arrosage programmé stoppe au moment où j'entre dans NEW CUMBERLAND.

Les sirènes du sheriff

Une file de voitures, une rue étroite, des feux, une bonne remise à niveau qui va m'obliger à changer de braquet dare-dare: ce n'est pas le moment de changer de tenue. C'est donc en feu follet rouge que j'aborde la cité et que j'entreprends de la traverser. J'entends derrière moi sans les voir à cause du poncho que ça patiente, l'étroitesse de la chaussée ne permettant pas de dépasser. Tout à coup, un coup de Klaxon retentit: étant parfaitement à ma place, je ne bronche pas. Un deuxième se fait entendre: toujours pas de réaction du cycliste. Le troisième a une tonalité toute différente, c'est carrément la sirène de la voiture de police. Je stoppe donc et me retourne pour apercevoir la voiture du sheriff.

Avoir la police aux fesses, c'est plutôt bon signe pour un cycliste, sauf que là il y a un problème d'orthographe. Qu'est-ce que j'ai pu faire? Bon, l'officer m'interpelle. Je ne suis pas prêt à son accent, mais je comprends un mot (le bon: sidewalk, trottoir) et je vois son geste de la main. J'ai compris mais je fais un peu l'idiot: "I'm sorry, officer, I'm French and unfortunatelly I don't understand very well American English" (Excusez-moi, monsieur l'agent, mais je suis Français et malheureusement je ne comprends pas bien l'Américain: c'est ma phrase favorite, celle qui calme les ardeurs et en général change l'atmosphère). Ça marche. Je dois donc rouler sur le trottoir. Je dis encore quelques mots pour la forme, que je n'aurais pas cru ça possible, qu'en France c'est interdit, et bla et bla. En même temps, je dégage la route en montant le lourd vélo sur le trottoir de droite, trottoir impraticable d'ailleurs et il le sait, c'est pourquoi il m'a montré le trottoir d'en face. Je pense auparavant pouvoir enlever le ridicule poncho pour changer mon image avec le beau maillot qui est dessous. Mais non, en face c'est tout de suite, et il attend. Et tout le monde attend puisque évidemment les voitures sont arrêtées derrière celle du sheriff, mais aussi les voitures d'en face qui visiblement dans ce cas là doivent stopper. Et tous les gyrophares de la voiture tournent et Menou traverse la rue. Me voici donc obligé d'emprunter sur 3/4 de mile un mauvais pavage, plein de trous remplis d'eau. Notez bien: c'est la deuxième section pavée de la journée en comptant les travaux du matin.

Les usines du centre-ville

Je vais quitter la WEST VIRGINIA à WEIRTON pour franchir à nouveau l'OHIO RIVER, et revenir dans l'État de l'OHIO à STEUBENVILLE, sur l'autre rive. D'après le mileage indiqué par mon compteur, je devrais être à WEIRTON. Or, je roule entre deux rangées d'usines. Ce n'est que peu à peu que je comprends que je suis bien en plein centre-ville et qu'ici les squares et les rues ont un drôle d'aspect. Pauvres gens qui y vivent!

La zone

A l'entrée de STEUBENVILLE, je dois faire un choix: ou je vais vers le centre, ou je "monte" vers University drive (le boulevard de l'Université). Ayant en tête le coup raté de la veille (motel au lieu de B&B), je choisis l'option centre. Aie! Je vois tout de suite qu'ici je ne suis pas à BEAVER. Habitat délabré, jardins en friches, carcasses de voitures, population désœuvrée (beaucoup de gens de couleur, d'ailleurs), police qui patrouille, rues du centre à l'abandon. Je me fais d'ailleurs interpeller à deux ou trois reprises. WEIRTON, STEUBENVILLE: c'est ça aussi les US. Pour la première fois je ne me sens pas en sécurité. Je stoppe immédiatement dans une station service et me renseigne auprès de la gérante pour savoir s'il y a des motels: Yes, University drive.

Card, no cash

Ok, retour sur 2 miles, nouvelle ascension, je laisse passer les établissements de luxe (un soir ça allait, deux je ne peux pas) et arrive sous le porche d'un Super 8, une chaîne de gamme moyenne standardisée. L'orage se déclenche à peine ai-je mis pied à terre. "Do you have a room for one night, please?" (avez-vous une chambre pour la nuit?, après l'habituel "I'm sorry... voir plus haut). No problem. Si, un quand même: à cette heure-ci, paiement par carte, pas de cash (espèces). What? (quoi?). Qu'est-ce que c'est que cette histoire? Bon, il n'y a pas le feu, la carte je l'ai, mais pour des petits montants les frais sont importants et je veux utiliser mes dollars. Évidemment, la clientèle de ces établissements est modeste et la dame m'explique qu'ils ont beaucoup de faux billets. Mais je discute (qu'est-ce que je suis discutailleur, quand même!), je fais rire un monsieur en tenue de chantier qui attend derrière moi en argumentant que si j'étais un bandit je ne m'échapperais pas sur un vélo lourdement chargé, bref je trouve sans problème tous les mots qui parfois me manquent. Je dois sortir des sacoches des documents qu'on ne me demande jamais (permis de conduire national et international, billets d'avion). C'est de la folie, mais je résiste. Une demi-heure plus tard, je me verse un café à la machine du hall: j'ai la chambre, payée en cash.

Vos messages

Je vais arrêter là. La suite a été sans souci. Il a beaucoup plu au départ le lendemain et c'est sous des trombes d'eau que j'ai dû demander deux fois ma route pour sortir de la ville en évitant la route express, puis le temps s'est amélioré et l'étape a été plus facile à partir de l'après-midi, la petite route empruntée ayant encore été très difficile dans la première partie (mais je m'y attendais, la gérante du motel, celle du cash, avec qui je suis devenu très copain, m'ayant prévenu). J'ai vu à NEW RUMLEY, dont il était originaire, le monument du général Custer, celui là même qui périt à la bataille de LITTLE BIG HORN avec tous ses hommes par suffisance envers les tribus indiennes qu'il combattait. Le soir, au motel, comme je nettoyais le vélo sous l'auvent, j'ai fait la connaissance de Dave Junge, qui venait chasser la dinde sauvage avec deux de ses copains. Nous avons mangé ensemble tous les quatre: soirée sympa. Et ce matin, malgré le froid et un frisquet vent de nord-ouest, j'ai retrouvé sur la 36 West le plaisir du vélo avec une route ensoleillée et humainement vallonnée.

Je voudrais plutôt répondre à la question de Jacques: vois-tu nos messages? Et bien oui, Jacques je les vois et ils me font beaucoup de bien. Je vois que tu suis l'affaire de très près et je t'en remercie. Je sais que vous tous vous intéressez à ce voyage même si vous restez discrets. Si j'ai un vœu à formuler, c'est que vous envoyiez vos messages plutôt sur le blog qu'à mon adresse e-mail qu'elle, par contre, je ne peux pas consulter. C'est donc un merci général que je vous adresse.

Je ferai quand même deux exceptions. D'abord pour adresser toutes mes félicitations à Michel Jodoin, de Montréal, qui nous a appris que nous allions devenir tante et tonton. J'ai beaucoup pensé à toi, Michel, à New York et juste au-dessus: il y avait longtemps que nous n'avions pas été aussi proches.

Le deuxième remerciement particulier sera pour Messieurs Chedhomme, père et fils, de Nice, avec qui je suis en relation commerciale. Il est rarissime qu'une relation de ce type se poursuive au-delà du domaine professionnel. Messieurs, je dois vous dire que le blouson que vous m'avez offert si aimablement est bien utilisé. Simplement, je le réserve pour mes activités extra-cycliste. Je l'ai beaucoup mis sur le bateau et je le porte ici pour sortir le soir. Je l'ai en ce moment sur le dos, dans la library de MOUNT VERNON.

Hélène m'a demandé ce matin: combien as-tu fait de kilomètres? En miles, j'en suis à 755 en 15 jours soit 50,33 par jour: pile la moyenne que je m'étais fixée malgré les jours de repos et... les côtes.

Je l'ai toujours dans la tête, c'est pour elle que j'avance : vous avez deviné de qui je parle. Sinon, réponse au prochain message.

So far, so good.

5 Comments:

Anonymous Anonyme said...

Hello, brother!
Nous sommes ravis de constater que tes instants de galère sont (provisoirement?) terminés... Nous pourrons ainsi faire lire ton dernier message à mam (on craignait que les nouvelles négatives ne l'affectent trop).
Eh oui, beaucoup de monde t'accompagne au cours de ce trip, même mes petits élèves te suivent chaque jour: "Alors, il a écrit Bernard?". Ils sont très impatients et passionnés par ce que tu fais, alors ne les déçois
pas (ceci afin de te remettre un peu de pression pour les moments de doute...)
Bisous et ...go on!
Susu

9:44 AM  
Anonymous Anonyme said...

Fortunatelly, or unfortunatelly, celà me rappelle un cours avec Sarah isnt'it, go west bold boy, les jours meilleurs arrivent.

9:59 AM  
Anonymous Anonyme said...

Super Bernard. En ce jour 21 mai de l'an de grâce 2006, nous t'adressons nos salutations dominicales. Merci d'avoir exprimé que tu lisais ton blog et que tu appréciais nos soutiens. Nous pédalons de coeur avec toi, en particulier dans les moments difficiles, tu dois d'ailleurs en ces instants là, sentir comme un sifflement amical dans tes oreilles...Comme c'est bon chez soi de pouvoir ainsi pédaler à tes côtés et vivre ce que tu nous racontes et voir ce que tu nous montres, sans devoir choisir poncho ou maillot. Notre connaissance des US va progresser à la cadence de tes messages imagés : ton rythme nous convient. Amitiés et encouragements dans les côtes un peu raides des Jack's de Sendets.

7:09 PM  
Anonymous Anonyme said...

Bonjour Bernard,

voici un message d'encouragement de la part d'Helga que j'ai eu au téléphone hier soir. Elle est encore à New York pour 2 ou 3 jours car son bateau est en retard. Visiblement, l'océan lui manque. Elle "frémit des narines" d'impatience selon son expression, comme toujours imagée.
Je lui ai raconté vos aventures américaines qu'elle ne peut lire en direct sur internet. Voici ce qu'elle m'a dit :" Ecoute, je ne comprends rien à ce truc (elle parle du blogg), mais ce qu'il fait cet homme-là, c'est super ! Puisque tu sais comment ça marche, dis-lui bonjour de ma part et tous mes encouragements".
Voilà qui est fait.
Permettez-moi d'y ajouter, une nouvelle fois, les miens. Et de vous remercier pour le plaisir de vous lire et de regarder vos photos.
Gilles-Laurent.

9:17 AM  
Anonymous Anonyme said...

Salut Bernard,
Je suis avec admiration le déroulement de ton "Aventure américaine". Continu de nous régaler avec ton passionnant récit. Sûr tu es parti pour un 2ème Charles Antonin.
Tu t'interroge sur mon sort, bien modeste mon périple comparé au tien. J'accroche mes sacoches lundi 12 juin, pour "essayer de terminer mon 2ème TdF.
Je n'aime pas la formule "bon courage" aussi je te souhaite "bon plaisir". Amitiés.
Jean Pierre Méliande

10:19 PM  

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