Messageries Maritimes
Hello, friends. Me voici enfin. Un voyage c'est pas du repos. Je reprends ou nous l'avions laissé, en mer. Et pour se remettre dans l'ambiance, ceci:
Je me suis embarqué sur un vaisseau qui danse
Et roule bord sur bord et tangue et se balance
Mes pieds ont oublié la terre des chemins
Les vagues souples m'ont appris d'autres cadences
Plus belles que le rythme las des chants humains
(Sorry: il n'y a pas d'accents sur le clavier)
Il fallait bien que cela se termine!
Il y a encore eu des choses apprises: la présence d'un cercueil a bord (rempli de caviar d'après Bernard-Jean), une leçon dispensée par le commandant sur le maniement du sextant pendant laquelle, tour a tour, nous avons calculé les angles.
Il y a eu des choses transmises. Les 5 passagers ont offert un apéritif a tout l'équipage, et une enveloppe pour le steward et le cuisinier. Christine est venue dans ma cabine m'offrir une palme en forme de croix, bénite le palm day 2005, avec une petite larme a l'œil, en me demandant d'être prudent. Christine et Wally ont laissé pour l'équipage DVD livres et vêtements. Les adresses ont été échangées pour au moins l'envoi de photos et... peut-être plus.
Il y a eu des journées grises. Pendant 2 jours, le Hudson a tranché dans une mer sombre, encombrée de nappes d'écume, tandis que la corne de brume retentissait inlassablement dans le brouillard. Alors sentant que la fin était proche, nous nous sommes enhardis a circuler sur le bateau malgré le vent froid et le pont glissant pour profiter goulûment des dernières heures de mer a la proue du navire.
Et la vigie a crié "terre"
Le 2 mai, vers 3 heures de l'après-midi, Bernard-Jean qui était sur le bridge est descendu malgré ses genoux blessés pour m'annoncer: ”Vous qui avez tant rêvé d'Amérique, je vous signale que la côte est en vue”.De fait, les puissantes jumelles du bord ne laissent aucun doute. Ce n'est encore qu'un trait a peine perceptible, mais ça va prendre de l'importance insensiblement. D'autant que le brouillard s'est levé, le soleil s'est montré et, sur l'horizon, une tâche argentée est tombée des nuées en fragmentation.
Une heure après, les jumelles ne sont plus nécessaires. Un pont apparaît: Long Island. Et c'est encore Bernard-Jean qui va attirer l'attention sur la silhouette des premiers gratte-ciels. Il y a d'abord 2 groupes très distincts. Il s'avèrera plus tard que c'est une illusion d'optique. Ils sont tous "sky-scrappers" de Manhattan, l'île qui enfanta New York. Les éléments du puzzle commencent a se mettre en place a l'œil nu, fini les jumelles.
Mais voici que l'attention se disperse, les évènements s'accélèrent. Peu après 19H30, la couverture nuageuse est trop faible pour nous priver d'un coucher de soleil, le premier de la traversée. Et un beau! Un de carte postale avec son trait de pinceau doré sur l'océan et son horizon flamboyant. Vingt minutes de spectacle non-stop dont la fin coïncide avec l'arrivée d'un premier pilote, un gaillard énorme en chemise blanche, décontracté, voix forte et rire gras. Les radios du bord braillent en américain de tous les côtés.
Et un autre spectacle commence, un peu semblable a celui du départ: la côte américaine se met a scintiller. Plus tard, le Verrazano Bridge qui barre l'entrée de la Hudson River s'éclairera en vert, comme pour se distinguer du pont du 25 avril auquel il ressemble furieusement. Le pont de Verrazano doit entre autre sa célébrité au marathon de New York dont il est le point de départ.
Entre temps, un autre pilote est arrivé pour la remontée de la Hudson River. Encore un beau poulet! Du coup, le premier, libéré de son job, vient parler avec nous sur le pont découvert. Ouch! Le choc de l'accent. Enfin, il nous explique ce que nous voyons, statue de la Liberté et pont de Brooklyn entre autres.
Cost Guards
A plus de 23H, le Hudson est a quai a Newark (New Jersey). Retour aux cabines: C'est très beau tout ça, mais les bagages sont restés au point où ils en étaient a 15H. Donc, au boulot. Pas longtemps. Ca hurle dans les hauts-parleurs de la coursive passagers: contrôle de l'immigration. Bernard-Jean était déjà au lit!
J'arrive le premier dans la salle a manger où les garde-frontières sont installés. "Good night": ils ne lèvent même pas la tête. Ça commence bien. Heureusement le Commandant survient, puis Bernard-Jean, puis Helga. Ce qui intrigue les deux cost-guards c'est la raison pour laquelle mes deux compagnons repartent ensemble en bateau dans 15 jours. Heureusement, Helga l'ouvre: "me, no fly, in New York because mari (”comment on dit mari?”, en se tournant vers moi) my husband died in 2005 and remember". Le chef comprend, les yeux d'Helga l'adoucissent, ça passe.
Retour aux cabines, sans incident notable, et coucher a... 1H20
La terre d'Amérique
Réveil a 5H20 (l'esprit veille), petit-déjeuner a 7H, trousse de toilettes dans les sacoches a 7H30. Le taxi arrive plus tôt que prévu a 8H. Rapide visite au bridge, salut au Commandant et aux officiers présents, le steward et l'aide cuisinier portent l'excédent de bagages. Descente de la coupée, "Red Dog" a bout de bras, tandis que les bagages prennent le raccourci avec la grue du bord.
Et enfin, nous posons le pied sur la terre d'Amérique.
Il fallait bien que ça se termine, mais il y a de l'émotion. Une bonne partie de l'équipage est accoudée au bastingage et nous salue. Christine enfile au bras d'Helga un de ses bracelets. Les deux pleurent. On charge le taxi, un très gros monospace. Tout y rentre: passagers, bagages, et Red Dog. Direction le portail du port. Je m'arrête là avec Christine et Wally, Bernard-Jean et Helga continuent vers New York City. Poignée de mains, bisous. Helga fond en larmes, met ses "Ray Ban" et disparaît derrière les vitres fumées.
Peu après arrive, avec son gros 4X4, la fille de Christine et Wally qui garde la voiture de ses parents venus d'Atlanta. Une très joli femme. On me présente, explique mon projet, "nice!", "beautiful", "very nice". J'aide Wally essoufflé a charger les bagages. "Good bye, take care" (faites attention) dit Wally en me donnant l'accolade. Christine semble me dire la même chose mais comme elle pleure je ne comprends pas bien.
Il est un peu plus de 8H30. Me voilà seul avec tout mon bardas. C'est fini.
posted by Eric Menou | 22:51
1 Comments:
Fini, non, ça commence, good luck!
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